lundi 11 février 2013

Arrêt sur les maladies nosocomiales du 31.01.2013



Nous tenons à vous informer d'un important arrêt rendu le 31.01.2013 par la Cour de Cassation en matière médicale et en particulier de nosocomie (maladie contractée en milieu hospitalier).
L'arrêt du 31.01.2013 est révolutionnaire en droit médical.

Avant cet arrêt, il était en effet admis qu'un hôpital ne pouvait être rendu responsable d'une infection nosocomiale c'est à dire d'une infection dont le foyer était à trouver au sein de la clinique même. C'était la théorie de l'aléa thérapeutique.

Depuis l'arrêt du 31.01.2013, les patients qui sont ou ont été victimes de nosocomie pourront utilement assigner en indemnisation l'hôpital responsable.



Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, 31.01.2013, N° 8/13, Numéro 3099 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, trente et un janvier deux mille treize.

Entre:

l)A, employé privé, et son épouse,
2)X, employée privée,
les deux agissant tant en leur nom personnel qu'en tant qu'administrateurs légaux de leurs enfants A1, né le 25 mars 2006, A2, né le 25 mars 2006 et A3, né le 21 mai 2003.

demandeurs en cassation,

comparant par Maître V, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu,

et:

l)l'établissement public CHL, défendeur en cassation,
comparant par Maître S, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu,

2)l'établissement public CNS, défendeur en cassation,
comparant par Maître M, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu.


LA COUR DE CASSATION:

Sur le rapport du conseiller et sur les conclusions du premier avocat général;

Vu l'arrêt attaqué rendu le 14 décembre 2011 sous le numéro 36338 du rôle par la Cour d'appel, septième chambre, siégeant en matière civile;

Vu le mémoire en cassation signifié le 16 janvier 2012 par A et X aux établissements publics CHL et CNS, déposé au greffe de la Cour le 17 janvier 2012 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le premier février 2012 par l'établissement public CNS à A, X et à l'établissement public CHL, déposé au greffe de la Cour le 8 février 2012 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 7 mars 2012 par l'établissement public CHL à A, X et à l'établissement public CNS, déposé au greffe de la Cour le 9 mars 2012 ;

Sur les faits:

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, statuant sur une demande des époux A - X, agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'administrateurs légaux de leurs trois enfants mineurs A1, A2 et A3, tendant à voir déclarer responsable le CHL de l'infection nosocomiale dont a été victime l'enfant A1 peu après sa naissance prématurée et à se voir indemniser du préjudice par eux subi suite à cette infection nosocomiale, le tribunal d'arrondissement de Luxembourg avait dit cette demande fondée et avait ordonné une expertise aux fins d'évaluation du préjudice subi; que sur appel du CHL la Cour d'appel, par réformation du jugement entrepris, a dit la demande non fondée.

Sur le moyen unique de cassation:

tiré « de la violation de l'article 1147 du Code civil,

en ce que la décision attaquée a motivé qu'« il appartient (...) aux demandeurs de rapporter la preuve d'une faute à charge du CHL en relation causale avec l'infection nosocomiale litigieuse» (page 6 in fine),

aux motifs que « l'infection nosocomiale dont a été victime l'enfant A1 est à considérer comme un aléa thérapeutique, de sorte que l'obligation de sécurité accessoire incombant au CHL du chef de l'infection nosocomiale dont a été victime l'enfant A1 est une obligation de moyens» (page 6, § 3),

alors que le contrat d'hospitalisation et de soins conclu entre un patient et un établissement de santé met à la charge de ce dernier, en matière d'infection nosocomiale, une obligation de sécurité de résultat dont il ne peut se libérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère,

de telle sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé le texte susvisé»;

Vu l'article 1147 du Code civil;

Attendu que l'obligation accessoire de sécurité contractée par l'établissement de santé en matière d'infection nosocomiale est une obligation de résultat;
.

Attendu qu'en retenant qu'il appartient aux demandeurs de rapporter la preuve d'une faute à charge du CHL en relation causale avec l'infection nosocomiale litigieuse, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

D'où il suit que l'arrêt encourt la cassation;

Par ces motifs:

casse et annule l'arrêt rendu le 14 décembre 2011 sous le numéro 36338 du rôle par la Cour d'appel, septième chambre, siégeant en matière civile;

déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s'en sont suivis et remet les parties dans l'état où elles se sont trouvées avant l'arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel, autrement composée;

condamne le CHL aux frais et dépens de l'instance en cassation et en ordonne la distraction au profit de Maitre M, sur ses affirmations de droit;

ordonne qu'à la diligence du procureur général d'Etat, le présent arrêt sera transcrit sur le registre de la Cour d'appel et qu'une mention renvoyant à la transcription de l'arrêt sera consignée en marge de la minute de l'arrêt annulé.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président, en présence du procureur général d'Etat adjoint et du greffier à la Cour.